L’expérience menée consiste à instrumenter les fonctionnalités d’un monde virtuel dans un dispositif d’apprentissage.
Ce travail qui s’inscrit dans un processus d’expérimentation, cherche à analyser les conséquences du numérique dans un contexte de perturbation du temps et de l’espace.
Gérer le temps et l’espace de travail
Ce point particulier est certainement le point le plus politique de mon expérience, celui qui peut déterminer le passage de l’expérience à la généralisation. Je rappelle que le travail mené est de l’ordre de l’expérience, il relève d’une intention personnelle, d’une démarche construite. La construction a priori induit une prise de risque pédagogique qui prend du sens parce que l’enseignant concepteur n’a pas économisé son temps, parce que les étudiants ont adhéré au principe, parce que j’ai réussi à emmener dans mon histoire d’autres enseignants et des acteurs extérieurs.
En résumé le travail est le résultat d’un pari sur le temps et de l’équilibre fragile d’une construction sociale.
Aller de l’expérience à la généralisation c’est se poser la question du temps et de l’espace numérique et de sa traduction statutaire.
Je l’ai souligné plusieurs fois, le numérique en général, les mondes virtuels en particulier modifient les paradigmes de l’apprentissage.
L’ensemble des expériences que j’ai mené, l’ont été à des heures que je qualifierais d’atypiques ou non statutaires. Toutes les conférences se sont déroulées à partir de 20 heures 30 et se sont achevées vers 22 heures 30 - 23 heures. Les heures d’individualisation pendant les vacances ou pendant le congé de fin de semaine.
Ce cadre constitué de travail modifie à la fois le temps de travail des enseignants et des étudiants.
Comment peut-on qualifier ces temps ? A l’heure actuelle, mon temps de travail est déterminé par mon VS (vérification de service), il induit assez normalement le temps de présence devant élèves et le temps de préparation.
La construction de modules de formation dans les mondes virtuels déconstruit ces équilibres. Une conférence n’est pas une préparation puisqu’elle est l’aboutissement d’un long cheminement de préparation (formation des acteurs, écriture des textes, relation avec les acteurs intervenants ...). Ce n’est pas un cours au sens où l’institution l’entend, ce n’est pas une préparation, ce n’est pas un temps de présence dans les locaux scolaires. Alors quelle est la qualification juridique de ce temps ? Interroger le statut des enseignants ne renseigne pas plus puisqu’il a été élaboré en 1950 (une ère archéo - digitale). A ce stade de mon travail, je suis en capacité de dire ce que n’est pas un temps de travail dans un monde virtuel mais pas ce qu’il est ou ce qu’il devrait être.
La lecture des nombreux écrits de Jacques Rodet nous éclaire sur ces enjeux. Le groupe facebook[1] et le blog de T@d[2] sont une mine de renseignements prospectifs. Quelques titres de billets « Le tuteur à distance travaille-t-il le 1er mai ?[3]» - «grille d'évaluation des conditions de travail des tuteurs à distance[4]»
En contextualisant ces questionnements dans le cadre du secondaire, de nombreuses pistes émergent :
Nous sommes certainement au début d’une réflexion, je m’exprime non en tant que partie prenante mais avec une prise de recul réflexif qui pourrait s’apparenter à un acte de recherche si j’étais rattaché à un laboratoire universitaire.
Cet article est un extrait du bilan annuel d’expérience de Jean-Paul Moiraud professeur de gestion au Lycée La Martinière-Diderot de Lyon.